Le 9
juillet 2011
La dernière représentation des Enfants
du paradis au Palais Garnier, le 15
juillet 2011, marque au fer rouge le départ du danseur et chorégraphe José
Carlos Martinez de l’Opéra de Paris. Ce ballet, inspiré du film homonyme du
tandem Carnet-Prévert, est une création de cet espagnol dans lequel il
interprète, pour ses adieux, le pantomime Baptiste, éternel amoureux de la
flamboyante Garance. Une étoile filant vers un nouveau destin.
José Martinez, le chorégraphe
José Martinez ne s’est pas lancé
seul dans cette incroyable aventure. Touchée par sa créativité, Brigitte
Lefèvre, directrice de la Compagnie de l’Opéra, lui propose en 2008 de prendre
en charge l’adaptation des Enfants du
paradis. Un défi grandiose pour un homme qui ne recule devant rien. Les pas
se créent peu à peu dans sa tête, les formations et les variations se dessinent
sur le papier. Un travail qui prend du temps pour un résultat à la hauteur de
la photographie et des dialogues du film. Ces dialogues, mythiques, sont
traduits par les mouvements, les gestes et les expressions des visages :
le langage du corps au service de la parole. Par son ballet, José Martinez
retranscrit le spectacle et la magie du film en impliquant le spectateur dans
l’œuvre ; « cela me permet d’avoir 1800 figurants chaque
soir ! » avoue-t-il. Pour mettre en place tout cela, le danseur est
confronté à une solitude qu’il ne parvient pas à surmonter. Il s’associe alors
à son amie et danseuse Arentxa Sagardoy, « le fait d’être deux, ça
enrichit le travail ». José Martinez ne s’arrête pas seulement à cette
collaboration. Il n’oublie pas sa fidèle partenaire, Agnès Letestu, danseuse
étoile depuis 1997 et styliste. Elle confectionne les costumes des Enfants du Paradis en mettant un point
d’honneur à la couleur des vêtements. Un film en noir et blanc et pourtant, qui
n’a jamais imaginé les tons de la robe de Garance ? Agnès Letestu reste
fidèle à l’ambiance de l’œuvre en intégrant des habits des années 1840, « cette
manière d’adapter des styles vestimentaires du passé à un ballet contemporain
est ma façon de rendre hommage au film de Marcel Carné et de Jacques
Prévert ». Les enfants du paradis
est le premier travail majeur de José Martinez mais pas pour autant sa première
création. En 2002, Mi Favorita pose
les prémices de sa carrière de chorégraphe. Un ballet humoristique inspiré des
grands noms de la danse classique tels que Béjart, Noureev et Kylian.
Déjà, les costumes sont réalisés par son amie Agnès Letestu, toujours près de
lui, même lors des adieux du 15 juillet où elle y incarnait Garance. En 2005,
il crée Scaramouche pour l’école de
danse de l’Opéra, qu'il qualifie d'« une sorte d’escapade rêveuse et
ludique ». La même année le solo Parenthèse
1 voit le jour pour Laëtitia Pujol. Avec Delibes Suite, José Martinez rend hommage au compositeur Léo
Delibes grâce à ce magnifique pas de deux qu’il dansera, une fois de plus, avec
sa princesse Agnès. De nouveau, il
propose une création pour l’école de danse en 2009, Ouverture en deux mouvements. D’autres œuvres naissent dans
l’imaginaire de cet hidalgo ténébreux comme
El Olor de la Ausencia ayant pour contexte la guerre d’Espagne ou encore un
ballet sur Marco Polo créé dans le cadre de l’exposition universelle de
Shanghai 2010. Son génie pour la chorégraphie, réellement reconnu depuis Les Enfants du paradis, va de pair avec
son talent de danseur.
José Martinez, le danseur
Grâce au rôle de James dans le
ballet La Sylphide, il devient étoile
la même année que sa muse Agnès Letestu. Son charisme, sa légèreté et son
interprétation ont fait de lui l’un des plus talentueux danseurs de sa
génération. Une carrière qui débute suite au Concours de Lausanne auquel il
reçoit le premier prix en 1987. Suite à sa prestation, l’Opéra de Paris l’intègre
dans son école pour un an et l’embauche dans le corps de ballet l’année
suivante. Très vite il devient sujet et premier danseur, pour atteindre, dix
ans plus tard, le rêve de tous danseurs, celui de toucher les étoiles. Les
chorégraphes Pina Bausch et Mats Ek le choisissent pour leur création ; dans Orphée
et Eurydice pour la première et Giselle pour le second dans lequel
Martinez incarne l'Hilarion de Giselle. Inséparable de l’étoile Agnès Letestu
au début de sa carrière à l’Opéra, leurs duos deviendront malheureusement plus
rares par la suite. José Martinez se dévoile dans des ballets comme Don
Quichotte, Coppélia ou encore Capriccio. Ses apparitions sur
scène ne laissent pas indifférent car ce danseur parvient à s’approprier le
rôle et à l’incarner avec une extrême justesse. Avec sa longue et svelte
silhouette de prince charmant, il touche le cœur du public. Sa technique
saupoudrée d’entrechats, de pirouettes et d’arabesques ajoute encore un peu
plus de charme à ce merveilleux séducteur. Une rigueur et un sens artistique
maîtrisés avec grâce et légèreté qui traduisent parfaitement la beauté de son
métier. Autant de qualités récompensées par de prestigieux prix comme le Prix
de l’AROP en 1991, le Prix du cercle Carpeaux l’année suivante, le Prix des
Arts scéniques d’Espagne en 2005, le Prix Benois de la danse en 2009 pour Les Enfants du Paradis... José Martinez connait une carrière fulgurante
au sein d'un Opéra aux multiples étoiles telles qu'Aurélie Dupont, Manuel
Legris, Nicolas Leriche, Marie-Agnès Gillot, Dorothée Gilbert.
Il a su imposer son style et prouver qu'il méritait sa place dans ce haut-lieu
de la danse. On le croirait même tout droit sorti de l’école de l’Opéra tant il
possède toutes les qualités exigées pour entrer dans le théâtre le plus
prestigieux du monde. Pourtant, José Martinez est espagnol et débute ses
classes dans son pays natal. Des terres ensoleillées qu'il quitte afin de
pouvoir lier école et danse. A présent, il délaisse la France qui l'a formé
pour retrouver ses origines et devenir le directeur de la Compagnie nationale
de danse de Madrid. Il n'oublie pas son pays d'adoption puisqu'il retrouvera
les planches en pentes du Palais Garnier l'année prochaine. Un retour aux
sources pour un danseur accompli et sereno.
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